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Articles taggués ‘fantastique’

BARRIE J.M. – Peter Pan

26/06/2010 5 commentaires

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Titre : Peter Pan
Auteur : James Matthew Barrie
Plaisir de lecture Livre sympa
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Au numéro 27 à Londres, aux jardins Kensington, vit la famille Darling, Mme et son mari Georges ont trois enfants, Wendy, John et Michael ainsi qu’une nourrice particulière… Nana, la terre-neuve. Bien qu’elle remplisse son rôle à merveille, elle se voit catapulter dans le jardin, au fond de sa niche, parce que quand même, une nourrice à poils, ça suffit ! Malgré la surveillance accrue de Mme Darling, elle s’endort et c’est la porte fenêtre ouverte à Peter Pan. A la recherche de son ombre, il entre dans la chambre des enfants. Wendy lui propose de conter toutes les histoires qu’elle connaît aux enfants perdus et de devenir leur maman. John, Michael et Wendy partent donc en direction du pays imaginaire. Cependant, ce n’est pas le paradis… Crochet ne rêve que de fuir le crocodile et d’attraper Peter Pan qui se joue tellement de lui. Il ne faut pas oublier que les indiens veillent et que les bêtes sauvages rôdent.

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)°º•. James Matthew Barrie nous propose une flopée de personnages fantastiques : pirate, sirènes, fées et indiens. N’oublions pas nos personnages « principaux ».
Commençons par notre jeune garçon Peter Pan. J’y ai découvert un Peter Pan différent (surtout en comparaison au Peter Pan édulcoré de Disney) car il ne possède aucun raisonnement rationnel et il est tour à tour crâneur, orgueilleux et « capitaine » aux ordres inflexibles. A la lecture, je l’ai ressenti un peu comme une douche froide. A l’inverse, il est tout à fait charmant de connaître davantage Mme Darling : Barrie met l’accent sur son rôle de mère et cet amour inconditionnel qu’elle apporte à ses enfants.
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Dans la version de livre que j’ai eue entre les mains, notre chère fée s’appelle de son nom entier Clochette-la-Rétameuse car elle récupère et nettoie les casseroles ; elle est par ailleurs, souvent appelée Clo au cours de l’histoire. Bien qu’elle voue une jalousie sans limite à Wendy, elle me parait beaucoup moins garce que dans le souvenir que je m’en faisais.
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Lis Tigré n’est également pas en reste quand on sait que cette Peau Rouge est une fiancée non mariée… très adepte de la machette. Personne ne l’emmènera donc devant l’autel. On aurait presque pitié de Jacques Crochet à cause de sa phobie à rencontrer de nouveau, le crocodile. Il est également entouré d’une troupe mal troupée de pirates. On y découvre aussi sous d’autres angles, les sirènes, les pirates de Crochet et le caractère de chaque enfant perdu.
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Au niveau des thèmes, nous sommes servis !
Bien évidemment prime le syndrome de Peter Pan avec la peur de la mort, l’angoisse du monde adulte (et donc des responsabilités). La candeur et l’innocence sont des traits majeurs, Peter Pan est le symbole de l’enfant qui ne veut pas grandir…
Ceci dit, l’amour maternel a une place de choix, l’amitié est également en bonne place, tout comme le rapport à la nature.

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)°º•. La grande surprise de ma lecture est celle de la manière dont James Matthew Barrie intègre le lecteur à l’histoire. Il parle à son auditoire et utilise l’écriture de la forme personnelle « je ». Il n’est d’ailleurs pas dénué d’humour, en atteste le sacrifice d’un pirate pour montrer comment Jacques Crochet utilise justement son crochet pour tuer : « et maintenant, pour illustrer les méthodes de cet homme, tuons un pirate » ; en atteste également la venue de loups pour montrer comment les faire fuir : il suffit de les regarder à travers ses propres jambes écartées et arquées.
Les anecdotes sont également appréciables, notamment l’histoire du dé qui se révèle être le nom qu’utilise Peter Pan pour un baiser.
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Il n’en demeure pas moins que nous passons du léger et badin au sombre et dramatique en l’espace de quelques lignes. Ce conte n’est pas spécialement estampillé « jeunesse » et peut révéler différents niveaux de lecture.
Par contre, nous n’apprenons pas les origines de Peter Pan, ni même ce qu’il lui est arrivé : est-il question d’entretenir l’imaginaire ou son histoire est-elle bien trop cruelle ?

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)°º•. Dans tous les cas, il était tant de découvrir la véritable histoire de Peter Pan, celle de la plume de James Matthew Barrie ! Quelques notes sympathiques, quelques découvertes mais en attendant, ce classique renommé ne m’a pas entièrement emballée au vu des trop nombreuses longueurs, d’un Peter Pan un peu détestable… sans oublier qu’une fois l’adaptation de Disney visualisée, on n’oublie – et ce même après des années – rarement l’histoire dans son ensemble. Je fais sans doute partie des rares personnes qui n’ont jamais fantasmé ni sur le pays imaginaire ni sur Peter Pan.

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Sir James Matthew Barrie (1860-1937) est un écrivain écossais. Mondialement connu pour son personnage Peter Pan, il n’en a pas moins écrit un recueil des nouvelles qui ont un succès certain, des romans autobiographiques ainsi que des pièces de théâtre.

Pour aller plus loin : Sirjmbarrie.com

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)°º•. Extrait :
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Ce livre a été apprécié en lecture commune avec Laure.

Ce livre est en voyage !
Il vient directement de chez Bambi_Slaughter que je remercie, et part chez Tortoise…

Souvenir lié à ma lecture … et aussi mon premier C.L.A.P. :
Un petit livre qui m’a suivi partout… et qui attire énormément les regards dans les transports en commun, du genre « maiiis, elle lit Peter Pan ? Non, vraiment, elle lit Peter Pan ? A son âge ? »
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Lu aussi dans le cadre du challenge « Les Coups de Coeur de la blogosphère ».

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Des livres et des heures (Wictoria), Le coin lecture (Violaine), Les lectures de Kali, Mon coin lecture (Karine :)), Pilalire (Bookwormette).
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Pics : #1 Peter Pan par Giacobino, #2 Peter Pan par Dieguiglesias, #3 Peter Pan par Emptymug, #4 Peter Pan par SeriousBreakfasttime, #5 Peter Pan par Junglecookie, #6 Fuck you Peter par IsladelCoco.

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FUNKE Cornelia – Cœur d’encre ~ Sang d’encre, tome 2

12/06/2010 14 commentaires

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Sang d encre FunkeTitre : Sang d’Encre (Cœur d’Encre, tome 2)
Auteur : Cornelia Funke
Plaisir de lecture : etoile 5  Livre fantas…tique
Tome 1, tome 3

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Doigt-de-Poussière vit dans notre monde depuis dix ans… dix ans qu’il se languit de son univers, dix ans qu’il se languit de ses compagnons, dix ans qu’il désire tant retourner chez lui ! Grâce à l’aide d’Orphée, le voilà de nouveau chez lui, dans le Monde d’Encre.
Farid, son jeune compagnon apprend qu’une grande menace va anéantir la vie du Cracheur de feu. Il part à la recherche de Meggie et Mo qui habitent chez Elinor, la tante folle de livres. Malgré l’interdiction formelle de parler et de rêver du Monde d’Encre, Meggie n’a que ce royaume en tête. L’avertissement que Farid souhaite transmettre à Doigt-de-Poussière est l’occasion rêvée pour Meggie de rejoindre ce pays.
Après avoir créé et écouté une douce chanson de mots charmants, Farid & Meggie sont propulsés dans le Monde d’Encre à la recherche de Doigt-de-Poussière. Ils vont rencontrer tous les personnages que Resa a contés, connaître la géographie et les lieux enchanteurs du royaume. Mais dans cet univers, les personnes nourries de mauvaises intentions y sont nombreuses et tout ne se passe pas vraiment vraiment comme prévu. De fil en aiguille, Meggie, entourée de ses proches et amis, va devoir aider les habitants, participer à différentes aventures et faire sauter quelques obstacles. Les langues magiques ne sont point reines dans le Monde d’Encre.

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Sang d encre 02)°º•. Dans Cœur d’encre, nous avons fait la connaissance d’une pléiade de personnages avec notamment Meggie, Mo, Elinor, Doigt-de-Poussière, Fenoglio, Resa, Mortola, Basta, Farid & Gwin.  Après quelques aventures quelque peu périlleuses et même hautement dangereuses, notre beau monde a dû lutter contre Capricorne, une saleté finie et son Ombre, un méchant super méchant.

Entourés de l’amour des livres, avec un papa relieur, une tante collectionneuse et Meggie , une grande amoureuse des histoires ; nous avons pu toucher du doigt le Monde d’Encre. Dans ce nouvel épisode, nous allons tâter du terrain : poser pied & bagages dans ce royaume… et nous embarquons pour de pas peu tristes affaires, attention !
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Cornelia Funke nous présentait Cœur d’Encre, un one-shot qui pouvait se lire seul, avec une belle fin complète. Les tomes deux (Sang d’Encre) et trois (Mort d’Encre) reprennent les personnages évoqués dans ce premier tome et surtout l’univers magique. Par contre, ils demeurent inséparables : une fois le tome deux entamé, sachez que sa « fin » vous attendra dans le tome trois.

En attendant, bien que nous puissions considérer Sang d’Encre comme une suite facultative, j’y ai trouvé une intrigue bien plus complexe, une histoire rondement menée et sans aucun doute, un scenario bien plus mature.

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Sang d encre 03)°º•. Dans ce deuxième volet, nos personnages prennent de la profondeur, on s’y attache bien plus facilement. Indubitablement, nos sentiments envers eux, évoluent. Nos préférences se renforcent, et mon affection est d’autant plus importante pour Doigt-de-Poussière. Mais parallèlement, on se surprend à moins apprécier l’un ou l’autre au vu de leur comportement exaspérant et désastreux. Notons tout de même que les personnages qui deviennent secondaires dans Sang d’Encre ne sont pas en reste… et l’auteur nous permet de prendre régulièrement de leurs nouvelles.
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Assurément, le Monde d’Encre est bien plus qu’un coin de papier et d’encre : nous entrons littéralement dans un univers très moyenâgeux mais non moins super féerique. Les émotions des personnages jouent un rôle primordial pour l’histoire et leur réalisme plus que convaincant est un des grands atouts de la plume de Cornelia Funke. Elle les développe à l’exquis : aimer, détester, haïr, être triste, avoir du ressentiment. Les thèmes y sont étroitement liés avec l’amour, l’amitié et bien sûr, la magie présente de tous les côtés.

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Sang d encre 01)°º•. Tout comme dans Cœur d’encre, Cornelia Funke nous fait voyager dès les premiers mots : ils étaient charmants au premier tome, ils deviennent ici envoûtants ! Cela se ressent sur l’ensemble du livre, il semble mieux réussi. Sa plume est excellente et pas trop enfantine, ce qui permet de surcroît de renforcer notre curiosité. On a tellement envie d’entrer dans ce Monde d’Encre ! Quelques faiblesses sont à noter au sujet de l’intelligence et du comportement des personnages, des faits quelque peu prévisibles, et d’une visite trop express des lieux et paysages alors que nous aimerions tant en apprendre davantage. Petite note quant aux titres des chapitres un peu trop révélateurs, qui m’ont cassé quelque fois l’effet de surprise. Au fil des pages, ils s’améliorent de deviennent énigmatiques. Mais ils demeurent un piège vite agaçant.

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Les petits plus du livre :
– En fin de livre, nous découvrons un bref résumé de chaque personnage, sans spoil (histoire de se remettre dans le bain après la lecture du premier tome),
– La couverture est vraiment magnifique, elle donne une impression de tenir un vieux livre en cuir, avec ornements et enluminures,
– Chaque début de chapitre possède une citation d’un autre livre, et toutes sont répertoriées en « référence » en  fin de livre, et c’est une vraie mine pour découvrir des histoires inconnues jusqu’à lors,
– En fin de chapitre, Cornelia Funke nous propose ses petites illustrations qui ne payent pas de mine.

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Cornelia Funke)°º•. Biographie
Cornelia Funke est connue en tant qu’écrivain et illustratrice de livres enfants et jeunesse. Allemande de nationalité et éducatrice pour enfants de métier, Cornelia Funke s’est essayée à son premier roman en 1988 et travaille maintenant de manière indépendante. Elle a reçu le Book Sense Award de l’année, le Mildred L. Bachelder Award, le Prix Suisse de la littérature jeunesse, le Prix du Livre pour enfants de Zurich ainsi que le Torchlight Children’s Book Award anglais. En 2008, elle reçoit également la plus haute distinction allemande, l’Ordre du Mérite.
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La trilogie « Cœur d’Encre »
est un best-seller, traduit en 19 langues et vendu à plus de 4 millions d’exemplaires. En 2006, elle reçoit pour ce roman le Grand Prix de L’imaginaire.

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)°º•. Extraits

Meggie regarda les lettres, les belles lettres noires. Elle chercha le goût des premières syllabes sur sa langue, essaya de se représenter l’univers dont les mots parlaient à mi-voix, les arbres, les oiseaux, le ciel inconnu… Alors, le cœur battant, elle se mit à lire. Son cœur battait presque aussi fort que la fameuse nuit où, avec sa voix, elle avait dû donner la mort. Et pourtant, ce qu’elle devait faire cette fois-ci n’était rien en comparaison. Simplement pousser une porte, une petite porte entre les lettres.

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Sang d encre 04 Sang d encre 05

Sang d encre 06 Sang d encre 07

Sang d encre 08 Sang d encre 09

Sang d encre 10 Sang d encre 11

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Souvenir de lecture : Me demander dans quel monde de papier j’aimerai rentrer… Indubitablement, dans « la tapisserie de Fionavar » de Guy Gavriel Kay, mon premier amour littéraire.

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Ce livre a été apprécié en lecture commune avec Laure.
Littérature passion (Clochette) et Raison et sentiments (Matilda) sont aussi entrées dans les pages de papier.

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Pics : #1 Tintenblut par Lenas-Darkroom, #2 Staubfinger par Gold-Seven, #3 Meggie par Kiko

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FAZI Mélanie – Serpentine

31/05/2010 10 commentaires

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Titre : Serpentine
Auteur : Mélanie Fazi
Plaisir de lecture :  Livre à découvrir

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Mélanie Fazi nous invite à plonger dans « Serpentine », un recueil composé de dix nouvelles.
Les textes sont relativement courts et le fantastique est présent à petites doses. Le format particulier qu’est la nouvelle permet ici, de capturer des instantanés de vie : nous n’y trouvons aucune aventure grandiloquente, mais de petits « arrêts sur image » où est photographié le surnaturel dans notre « quotidien ».
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L’auteur nous accompagne à pousser une porte d’un salon de tatouage, à poursuivre des bêtises de deux cousins en vacances en Italie, à crier avec les fans pour la chanteuse Matilda, à lire sur tous les ponts le prénom Rebecca, à goûter des spécialités grecques… et bien plus encore.

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)°º•. Bien souvent le ou les narrateur(s) des histoires se révèlent être les personnages eux-mêmes.
Sans aucun doute, la part belle est pour la grande faucheuse… Mélanie Fazi nous présente cet étrange personnage sous toutes les coutures, selon différents angles de vue, passant quelques fois, même pour curieusement sympathique.
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A la lecture, nous attendons que surgisse l’étrange de cette histoire, la surprise qui nous aura à tout moment. Pour moi, manifestement c’est une sensation glauque que je ressentirai tout à long de ma lecture. La mort à tout niveau, la noirceur et l’impression d’être sous tension n’y seront pas étrangers.

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)°º•. Notons que la préface de Michel Pagel est un délice et une très bonne ouverture quant à cet ouvrage. La manière de se dépêtrer d’une rencontre avec un lecteur-écrivain est tout à fait charmante à découvrir.

Certaines nouvelles ont toute ma sympathie, comme ‘ Mémoire des herbes aromatiques ’ qui demeure ma préférée pour ce petit aperçu sur le restaurant grec tenu par Circé où Ulysse vient se restaurer et où il est servi par Médée. L’histoire a un côté léger, un peu décalé qui m’a beaucoup séduite. Le ‘ Petit théâtre de rame ’ a également réussi à me faire voyager, par le simple fait que j’aime également beaucoup les ambiances de métro et tout ce que nous pouvons « voler » aux gens rien qu’en les observant, un ou des lieux portant exquisément le nom de « théâtre ». ‘ Le faiseur de pluie ’ aura captivé mon côté enfant avec la remémoration et l’appel à mes propres souvenirs. Assurément, la manifestation de cet esprit de maison était l’élément « magique » qu’il me fallait. Enfin et non des moindres puisqu’elle m’aura presque tiré une larme, « Elégie » du le simple fait que j’aimerai tant que ce type d’aire d’autoroute existe vraiment…
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A l’inverse, certaines nouvelles m’ont déplues, notamment ‘ Matilda ’ avec l’action collective qui, à mon avis, ne demeure un peu bancale, malgré une très bonne description des ambiances de concert ; et ‘ le passeur ’ qui m’aura passablement ennuyée, peut-être du fait que j’ai eu une impression de « déjà vu » quant au concept développé.

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Les dix nouvelles présentes dans le recueil :
Serpentine
Elégie
Nous reprendre à la route
Rêves de cendres
Matilda
Mémoire des herbes aromatiques
Petit théâtre de rame
Le faiseur de pluie
Le passeur
Ghost Town Blues

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)°º•. Une lecture commune mensuelle sur ce livre lui a été bénéfique : je n’avais pas envie de me plonger dans la noirceur de « Serpentine » à tout bout de champ et ai apprécié de l’avoir sous le coude comme une lecture annexe. Je pense qu’il aurait également fallu que je picore les nouvelles comme je le souhaitais et pas forcément dans l’ordre des pages.
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Il n’en demeure pas moins que la majorité des nouvelles m’a plue, a su m’emporter dans un autre univers mais pas littéralement me transporter. Et pourtant, j’ai beaucoup apprécié la fluidité de sa plume, les univers présentés. Il ne me reste donc à découvrir Mélanie Fazi avec l’un de ses romans !

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)°º•. Biographie
Mélanie Fazi, bien que connue dans un premier temps en tant que traductrice l’est aussi en tant qu’écrivain français (née en 1976). Elle voue ses premières amours à la nouvelle pour ensuite proposer à ses lecteurs, des romans.
Serpentine est son premier recueil de nouvelles, il a gagné le grand prix de l’imaginaire en 2005 et la nouvelle ‘ Matilda ’ a reçu le prix Merlin catégorie « Nouvelles » en 2002.

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)°º•. Extrait

_ C’est Jonas qui m’envoie.
Et son regard incandescent, comme sous l’effet d’une flamme en lui rarement éteinte, s’est illuminé d’un degré supplémentaire. Le sourire du lutin s’est fait gourmand.
_ Tu viens pour la spéciale, c’est ça ? Jonas a dû t’expliquer qu’elle n’est pas à la portée du premier venu.
Oui, Jonas m’a parlé de ces encres qu’ils sont cinq à se partager. Chacun son art, sa façon de procéder, et un but commun pour les cinq. Il m’a tracé les grandes lignes du récit qu’allait ensuite me détailler Nikolai, ce premier soir dans sa boutique.
Et dans ce regard, comme plus tôt dans celui de Jonas, une lueur de défi à mon intention : maintenant, Joseph, essaie de me surprendre. Raconte-moi ton histoire.

Au moins affiche-t-il clairement son goût de l’artifice : l’épaule que dévoile son débardeur arbore deux masques de théâtre tatoués, l’un souriant, l’autre pleurant. Il ressemble à ces ados malingres au goût prononcé pour le mysticisme à deux balles. J’en ai connu beaucoup. Il partage avec eux une façon de s’affirmer contre le monde, jusque dans ses moindres gestes, à la différence près que lui semble conscient de la farce.
_ Installe-toi ici, dit-il en désignant un siège. Je vais chercher le matériel. Sa voix garde une trace d’accent assez prononcé pour être repérable. Il rebondit à la surface des mots dont il peine à épouser le contour exact. J’imagine qu’il n’a jamais cherché à se corriger. Tout en lui est affirmation, jusqu’à ce prénom qui claque comme un coup de fouet et s’achève sur une envolée, rappelant qu’il vient d’ailleurs.
Je le regarde s’affairer avec une souplesse et une précision qui ne s’acquièrent qu’à force d’exercice. Il a le goût du geste parfait, jusque dans la façon dont ses longs cheveux blonds, des cheveux de jeune fille, accompagnent ses mouvement tel un voile.
_ Attends de voir le motif : je suis sûre que tu vas adorer, me promet-il.
Puis il me tend le croquis réalisé d’après ses esquisses de l’autre jour. Il avait écouté patiemment mon récit, sans sourciller, sans faire mine de s’offusquer comme je l’avais craint tout d’abord. Imène avait raison : ces cinq-là sont prêts à tout accepter, pour la seule beauté du geste. Ils se plient aux demandes les plus invraisemblables. J’ai su alors que j’avais trouvé mon homme. Celui devant lequel je pourrais mettre ma conscience à nue sans crainte de jugement moral. Parce que sa tâche est au-delà, et que seul importait le défi. Et la pièce de choix que j’apporterais à sa collection.

S’il te plaît, dessine-moi une pulsion.

C’est lui qui m’a aidé à préciser ma demande. Il n’a pas dû y en avoir beaucoup, comme moi, pour lui offrir de travailler dans l’abstrait. A force de patience et de questions, il m’a soutiré l’essentiel, et au fil de mes descriptions instables et maladroites, lui traçait sur le papier de grandes lignes crayonnées, affinées peu à peu.

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La lecture de ce livre a été réalisée dans le cadre d’une lecture commune
avec le Cercle d’Atuan : , El Jc, Lelf, Olya et Vert.

Au bout de la corde (le pendu), Chez Neph, Mon coin lecture (Karine), The world of Dunky, Welcome to Nebalia (Nebal) l’ont également lu.

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MARSHALL SMITH Michael – Les Domestiques

19/05/2010 6 commentaires

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Les domestiques Marshall SmithTitre : Les Domestiques
Auteur : Michael Marshall Smith
Plaisir de lecture : etoile 5  Livre fantas… tique

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Mark est un jeune adolescent de onze ans qui vient d’être déraciné de chez lui.
Après le remariage de sa mère avec David, il est contraint de quitter Londres pour s’installer avec eux à Brighton. Brighton, il connaît : il y allait durant ses vacances, avec sa mère et SON vrai père ; ils flirtaient avec les vagues et faisaient les petites boutiques de la rue passante. Le soir, ils commandaient souvent de la nourriture asiatique livrée.
Mais là, c’est genre, pour toujours. Il n’a encore pas recommencé l’école et va devoir faire face à son beau-père qui fait tout pour lui mener la vie dure. Brighton est une station balnéaire qui a été très cotée par les bourgeois londoniens il y a plusieurs décennies ; maintenant, c’est « plutôt mort ». Surtout qu’il n’a pas le droit de franchir le lotissement et son seul loisir est le skateboard : il tente tant bien que mal de le maitriser… mais finit bien souvent la tronche contre le bitume.
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C’est après une énième journée à se morfondre que Mark découvre que l’appartement du sous-sol semble habité, la porte est ouverte. La vieille dame l’ouvre en grand et lui demande de lui changer son ampoule. De fil en aiguille, il est invité à venir boire le thé et à manger un demi-biscuit infect. Pour contrebalancer la prise de bec entre Mark et David, la vieille dame souhaite lui donner du réconfort en lui livrant un secret. Elle lui fait visiter des quartiers inconnus : la demeure des domestiques. Et oui, cette vieille maison ne renferme un appartement au sous-sol que depuis quelques années seulement, avant il s’agissait de l’endroit où « vivait » le personnel.
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De retour chez lui pour y passer la nuit, Mark surprend des murmures, de minuscules bruits qui proviennent de la cloison de l’ancien escalier des domestiques. Sont-ce des fantômes, son imagination débordante ou son rêve si réaliste ?

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)°º•. Nous voilà entrés de plain pied dans l’univers écroulé d’un adolescent qui n’a rien demandé. Mark, avec un moral au fond des chaussettes, erre sur la plage (seulement celle devant le lotissement) en maudissant son skateboard. On va découvrir avec cette histoire, l’apprentissage de la vie… et ses perceptions !
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Ce livre est un instant de vie très bien capturé. On aimerait réellement rentrer davantage dans le côté « fantastique », mais ce n’est pas le but du roman. Pour ceux qui veulent de la magie dans tous les sens, il vaut mieux passer son chemin… tout comme les chercheurs de fantômes en puissance. Il est davantage question de ce petit bonhomme et de sa maturité.

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L’histoire est poignante, les ambiances sont superbes. Le pilier central du roman repose sur la grande place faite aux émotions et on se projette facilement aux côté de Mark, dans ces lieux si bien décrits. Le livre ne fait pas office de source à terreur mais d’atmosphères finement créées. Et puis, le suspense est relativement fort… A-t-il rêvé ? Qu’y-a-t-il derrière cette porte des quartiers des domestiques ?
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Le scenario n’est pas vraiment original mais le récit est bien conté et Marshall Smith se montre belle plume. La fin me semble quelque peu précipitée, et comme tout lecteur insatisfait éternel, j’aurai véritablement voulu que le mystère soit plus long et qu’il soit abordé plus en profondeur !

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)°º•. Michael Marshall Smith, né en 1965 en Angleterre vit actuellement aux Etats-Unis. Il s’éclate plutôt en « horreur » mais devient très vite populaire dans le royaume de la SF où il prend un malin plaisir à mélanger les genres et à se jouer des étiquettes, pour le plus grand bonheur de ses fans.

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L’illustration d’Anne-Claire Payet, présentée par Milady est bien « calibrée ». C’est grâce à elle, que ce livre – qui m’était totalement inconnu au bataillon – m’a fait de l’œil. « Les Domestiques » était présenté sur un support spécial par la médiathèque et son petit format – A6 de trois cent pages – avait tout pour me séduire !

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)°º•. Extrait :

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[La vieille dame] déposa une tasse de thé à côté de lui. Elle ne ressemblait à aucune des tasses à thé qu’il avait vues auparavant. Le liquide était d’un brun sombre, presque rouge.
_ Voilà.
_ Est-ce que c’est… un genre de thé spécial ?
_ Non, dit-elle en se laissant doucement retomber dans l’autre siège. C’est seulement fort la plupart des gens font leur thé bien trop léger. Et à quoi est-ce que ça sert ? Si vous voulez du thé, buvez du thé. Voilà ce que j’en dis.

A côté de la tasse, elle déposa une assiette sur laquelle était posé le contenu de son sac en papier brun. Il s’agissait d’un gâteau, mais d’un genre auquel Mark n’était pas habitué. Il pensait pourtant avoir vu des choses comme ça à vendre au Point de Rencontre. Le gâteau avait été soigneusement coupé en deux. Mark prit l’une des parts et y mordit prudemment. Il était dur, il avait un goût de farine et était garni de petits raisins. Ca ne collait pas avec l’idée qu’il se faisait de quelque chose de bon.
_ Très bon, dit-il en le reposant.
_ Continue, rétorqua-t-elle. Tout n’est pas bon à la première bouchée.
Cela ressemblait désagréablement au sermon que David lui avait fait à l’étage, avant qu’il s’enfuie. Et Mark se redressa sur son siège.
_ Oh, trésor, dit la vieille dame, est-ce que j’ai dit quelque chose de mal ?

Ils restèrent ainsi un moment. Mark reprit le gâteau et y mordit encore. Le goût était toujours bizarre, comme venu d’un temps où les gens mangeaient des trucs parce qu’ils étaient obligés de manger, et pas parce qu’ils espéraient en retirer du plaisir. La guerre peut-être, déduisit Mark, lorsque les choses avaient été en général de moins bonne qualité. En revanche, il aimait le thé fort. Et les troisième et quatrième bouchées de gâteau – il avait entre-temps revu son niveau d’exigence à la baisse – n’avaient pas été aussi mauvaises. Les raisins, au moins, étaient bons.

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 Les Tocades d’Eiram, Mes Imaginaires (SBM), Welcome to Nebalia (Nébal) ont aussi passé la porte des quartiers des domestiques.

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GAIMAN Neil – Des choses fragiles

04/05/2010 24 commentaires

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Des choses fragiles GaimanTitre : Des choses fragiles – Nouvelles et merveilles
Auteur : Neil Gaiman
Plaisir de lecture : etoile 3 Livre sympa peu s’en faut

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Avec ce recueil de nouvelles et autres merveilles, Neil Gaiman met l’accent sur les idées. Ces petites choses fragiles, quelques fois minuscules, quelques fois tarabiscotées, peuvent être mises sur papier pour répondre généralement à une demande. Neil Gaiman a voulu leur donne un foyer intemporel au sein de cet ouvrage.

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)°º•. Ces 31 nouvelles et poèmes sont toutes aussi différents les uns que les autres. Ils ont été écrits dans un cadre limité car Neil Gaiman ne les invente que sur commande. Les thématiques généralement en sont précises et sont écrites en vue de figurer dans des revues, dans des anthologies, pour ses enfants ou pour des événements. C’est sans aucun doute la richesse de ce recueil car l’hétérogénéité est de mise et est une agréable surprise pour le lecteur.

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Le côté bordélique présenté par l’auteur est sympa : il organise ses nouvelles selon ses propres envies et il ne tient qu’à nous de lire ce livre comme il nous chante : il n’y a pas d’obligation de lire les nouvelles les unes à la suite des autres, mais est privilégiée la pioche. La lecture de cette mosaïque est facilitée par la présence d’une introduction rédigée par Neil Gaiman qui permet, en outre d’expliquer la genèse de chaque récit.

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Des choses fragiles 01Neil Gaiman propose ici plusieurs univers, merveilleux et horreur s’y côtoie. Il est quelque fois, difficile de s’introduire dans un monde si singulier. J’avoue que les nouvelles lugubres n’ont pas eu mes préférences et à l’inverse, certaines ont simplement retenu mon attention dont notamment ‘la présidence d’Octobre’, ‘l’heure de la fermeture’ et ‘le jour de l’arrivée des soucoupes’. La seule nouvelle qui est un véritable coup de cœur pour moi s’avère être ‘le cartographe’ qui se situe en réalité dans l’introduction ! L’intérêt de bouquin se trouvera pour moi, dans l’interview de l’auteur présentée en annexe. Le reste m’aura quelque peu ennuyée et j’ai déjà oublié certains récits. Pour le coup, avec ce livre, je reste sur ma faim.
De Gaiman, je sais apprécier ses romans, mais en tant que nouvelliste, je passe allègrement mon chemin. Au vu des gratifications littéraires reçues, il va s’en dire que je ne suis pas faite pour ce « genre ».
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Neil Gaiman se plait à être nouvelliste car cela lui permet d’offrir un support à certaines de ses idées. Il y a des thématiques qu’il ne souhaite pas aborder sous la forme de roman. Il indique qu’il préfère passer quelques heures, un week-end ou une semaine sur une thématique d’horreur pour une nouvelle plutôt que 18 à 24 mois pour un roman.
Notons par ailleurs que les nouvelles et autres récits ont reçu de belles récompenses :
– Prix Hugo de la meilleure nouvelle en 2004.
– Prix Locus de la meilleure nouvelle en 2003, 2004 et 2005 !

Mention spéciale à la couverture, qui vraiment, traduit fort bien le contenu…

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)°º•. Gaiman, Neil de son petit prénom n’est plus à connaitre, tout le monde a déjà entendu parler de lui – du moins, j’ose espérer –. C’est un auteur britannique vivant aux USA et qui a fait son petit trou dans les rideaux du devant de la scène de la littérature fantastique (reprenons notre souffle). Comics, romans et nouvelles, Neil Gaiman a plus d’un tour dans son sac.
Son site/blog, son twitter.

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Dans le chaudron :
¤ Coraline,
¤ De bons présages,
¤ Neverwhere.
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Au fil de mes lectures (La liseuse) et Raison & Sentiments (Matilda) en parlent aussi.
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RICE Anne – L’heure de l’ange

17/02/2010 24 commentaires

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Couverture du roman "L'heure de l'ange" d'Anne Rice : aile blanche sur fond noirTitre : L’heure de l’ange
Auteur : Anne Rirce
Plaisir de lecture : etoile 3  Livre sympa

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Lucky le Renard. Perfectionniste de son état, dénué de sentiments, Lucky achève toujours ses missions de manière rapide et professionnelle. C’est pour les gentils, qu’il travaille. Enfin, qu’il essaye de se persuader. Le FBI et Interpole n’arrivent pas à le nommer : ils restent pour eux, un mode opératoire. Sous les ordres de l’Homme Juste, il tue froidement ses cibles avec une précision et une délicatesse extraordinaires.

Difficile de croire avec les besognes abattues, qu’il y a réellement un homme derrière cette ombre… alors qu’il se révèle passionné de luth et lecteur fébrile de livres traitant sur le sujet du moyen-âge. Lucky le Renard n’existe pas : connu sous diverses identités anonymes, connu comme une simple image floue des caméras de surveillance par le FBI et Interpol, Lucky vit sa vie… sans témoin.

L heure de l ange 01Actuellement résidant en Californie, le cœur de Lucky bat à l’unisson avec Mission Inn et San Juan Capistrano. Il se perd dans la contemplation de leurs églises et cathédrales, dans ces petits détails médiévaux, dans leur reconstruction et dans leur Histoire au fil du temps. Il aurait voulu être prêtre. Dès son enfance, il se voit plutôt dominicain bien que les prédications franciscaines l’attirent tout aussi. Cependant, bouleversé par la découverte du luth lors d’un opéra, Lucky à 12 ans, veut profiter des plaisirs de la vie et devenir un homme du monde.

Son plus grand plaisir est certainement « sa » suite à Mission Inn : il y va chaque fois qu’il peut : admirer la fresque plafonnière, profiter du lit à demi-baldaquin, jouer du piano à queue ou simplement s’asseoir à la magnifique table de granit. En ce moment, Lucky a peu de repères, il ne croit pas en Dieu, et se surprend à espérer pouvoir emmener ses livres historiques s’il devait aller en prison.

Ce matin, il reçoit un appel téléphonique de l’Homme Juste. Sa prochaine mission se déroule à Mission Inn, dans SA suite. Difficile de voir ce chez-lui se transformer en lieu d’une tâche professionnelle. Quelque peu ébranlé, il va devoir encore tuer. Mais la proximité entre son semblant d’intimité et sa charge le trouble plus que de raison.

Lucky, lui toujours si discret et invisible aux yeux des autres, se retrouve épié par d’étranges yeux bleus. Malchiach, propriétaire du regard azuré lui parle de son passé. Lucky ou Toby O’Dare, quelle différence ? Déconcerté, Lucky ne sait plus à quels saints se vouer…

Malchiach lui propose un pacte : sauvegarder des vies plutôt que de les voler. Se retrouver, se réinventer… et aider autrui. Le voilà catapulté au XIIIe siècle , au cœur de la juiverie de Norwich, à défendre un couple des persécutions d’émeutiers chrétiens.

Etrange rêve ou douce folie ?
L’heure de l’ange est capable de l’emmener… bien loin.

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L heure de l ange 02)°º•. Qu’il soit Toby O’Dare ou Lucky le Renard, il n’en reste pas moins indifférent.
Dès les premières pages, on approche Lucky le Renard dans son quotidien : sans nous révéler quoi que ce soit vis-à-vis de sa personne ou de son histoire, il va nous conter ce qu’il l’aime, le passionne ou ce qui l’irrite.
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C’est un bonheur de se balader au chant de sa description de ces lieux saints vénérés, de leur prodigiosité ou de leurs fonctions extraordinaires. C’est par rapport aux choses, que Lucky se dévoilera : la présentation des fresques tant aimées, du son de la chaussure sur les pierres bancales ou encore de la fraicheur des arches de divers endroits.
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L’histoire est majoritairement contée par Lucky le Renard, à la première personne du singulier. Pourtant, tour à tour, ce sont les autres personnages qui vont devenir narrateur au cours d’un ou plusieurs chapitres. Et c’est finalement grâce à ces morceaux assemblés que Luky le Renard va quitter cette enveloppe anonyme pour devenir quelqu’un à nos yeux.
Petit à petit on se rapproche de sa personnalité et de son passé pénible, à cette personne blessées aux idéaux noyés, à cette figure solitaire. Irrémédiablement, on s’attache à lui.

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L heure de l ange 03)°º•. Comme toujours,  Anne Rice nous transporte littéralement : commencer un de ses livres, c’est être plongé directement en son cœur, c’est entrer naturellement dans son univers, c’est être happé par l’histoire. Il en convient que le travail de traduction y est aussi dans la réussite de cette immersion totale.
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Elle nous entraine tour à tour à différentes époques, actuellement, vingt ans en arrière ou encore au XIIIe siècle. Invariablement, elle nous emmène dans différent lieux, avec la vieille Europe et la Nouvelle Orléans, si chères à son cœur.
Le tourbillon est mené d’une main de maitre : tous les aspects – lieux, époques, personnages – nous révèlent judicieusement par petites touches, l’aspect psychologique.
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Le thème principal et non moins très fort se concentre sur la civilisation juive médiévale, avec les relations entre chrétienté et judaïsme à une époque ou les persécutions des révoltés démarraient au quart de tour.

La grande présence de la religion ne doit pas rebuter ; bien que soient mis en avant les ordres des mendiants (prêcheurs dominicains et franciscains), les confessions chrétienne et juive, le livre est ouvert à et compréhensible par tout le monde.

Il existe des lecteurs qui n’aiment ou ne poursuivent pas leur lecture, au premier mot de « religion » rencontré ; qu’ils soient d’une autre confession que celle présentée ou athés (ou agnostiques). Cependant, avec l’heure de l’ange, on peut se rendre compte que ces religions révèlent un fond de toile intéressant pour une histoire captivante.
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Le travail de recherches, bien qu’utilisé naturellement pour le roman, se ressent. Les documents pris en appui sont nombreux et quelques uns sont cités en bas de page et à « la note de l’auteur » en fin de livre. Cette fonction est d’autant plus importante à l’histoire qu’elle l’enveloppe d’une véritable authenticité et permet au lecteur de pénétrer les pages. de notre nouvel amour, Lucky.

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Bon, en soit, l’histoire m’a plu. Bon, en soit, on attend forcément « mieux » d’Anne Rice. Elle nous a habitué dans ses romans fantastiques, à mêler le monde réel avec celui plus invisible. Elle a su nous emmener dans des intrigues très bien ficelées, avec un travail d’écriture époustouflant qui demande généralement et imagination débordante et efforts « techniques » pour un roman quasiment parfait. Ici, la deuxième partie du roman est un peu plus lâche que la première et un peu décevante. Certaines « solutions » s’avèrent un peu tirées par les cheveux et le rythme, mollasson. Alors sont-ce de réels défauts, ou une projection du lecteur qui veut toujours « plus », toujours « mieux » de la part de l’auteur ?

La seule chose qu’on pourrait reprocher à ce roman est sa brièveté. 270 malheureuses pages se révèlent bien trop courtes ! Surtout lorsqu’on est habitué à un tome de deux tiers supérieurs à celui-ci… qui prend sa place au sein d’une trilogie.

Anne Rice qui a déclaré être athée prend un chemin différent dans sa vie personnelle avec l’envie de « glorifier » Dieu. Et c’est avec « l’heure de l’ange » sans aucun doute que ce tournant s’inscrit dans sa vie d’écrivain.

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Anne Rice nous entraine en différents lieux et époques pour nous offrir un roman sur l’univers des anges, de leurs relations particulières avec les humains. Le thème de la civilisation juive médiévale est le bâti de l’histoire. Menée joliment, l’histoire de Lucky le Renard se découvre par petites touches. Mais malheureusement, avec cette nouvelle trilogie, elle ne comble pas nos espérances, elle se perd un peu en chemin et rend le tout un peu brouillon.

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Anne Rice)°º•. Biographie
Anne RICE, écrivain américain aux 100 millions de livres vendus, devient un des auteurs « actuels » les plus lus. Auteur des célèbres trilogie des vampires et trilogie des sorcières Mayfair, elle a écrit pas moins 22 de romans fantastiques, de nouvelles ou encore de livres à thème religieux. Elle est notamment connue pour ses histoires mêlant l’épique au style baroque et aux intrigues de différentes époques.

¤ Pour une fois, on ne pourra rien reprocher à des éditions françaises dans un titre traduit, judicieusement et sans faux-pas par rapport au titre anglais « Angel Time : The Songs of the Seraphim ». L’heure de l’ange

¤ Notons aussi que la couverture des Editions Michel Lafon est superbe : Une aile blanche sur un grand aplat noir et mat. Avec un vernis sélectif pour le nom d’Anne Rice. D’accord, l’aile est jolie, cependant, tout petit regret de la retrouver seule, en illustration à côté du titre du chapitre.

est un concept à découvrir entre les pages…

Je ne manquais jamais de m’aventurer dans le restaurant pour déjeuner. La piazza était magnifique, avec ses hauts murs percés de fenêtres arrondies et de terrasses semi-circulaires ; je sortais le New York Times, que je lisais tout en déjeunant à l’ombre de dizaines de parasols rouges.
Mais l’intérieur du restaurant n’était pas moins attirant, avec ses murs recouverts de carreaux de faïence bleu vif et ses arches beiges artistement peintes de plantes grimpantes. Le plafond à solives figurait un ciel bleu avec des nuages et même de minuscules oiseaux. Les portes de plein cintre à meneaux étaient couvertes de miroirs, tandis que d’autres laissaient passer le soleil venant de la piazza. Le bavardage des gens rappelait le murmure d’une fontaine.
Je me promenais, dans les couloirs sombres, sur des tapis poussiéreux, de styles différents. Je m’arrêtais dans l’atrium devant la chapelle Saint-François, contemplant l’embrasure lourdement sculptée, chef-d’œuvre en ciment moulé de style churrigueresque. Cela me réchauffait le cœur d’entrevoir les préparatifs de mariages, inévitablement luxueux et apparemment interminables, avec leurs buffets dressés dans de l’argenterie sur des tables drapées de nappes autour desquelles s’affairait le personnel.
Je montais jusqu’à la plus haute véranda et, appuyé sur la balustrade en fer laquée de vert, baissais les yeux vers la piazza du restaurant et l’énorme horloge située en face. J’attendais souvent son carillon, qui sonnait tous les quarts d’heure. Je voulais voir ses gros chiffres bouger lentement.
Un élément très puissant m’attire vers l’horlogerie. Quand je tuais quelqu’un, j’arrêtais sa montre. Et que font les horloges, les pendules, les montres, sinon mesurer le temps dont nous disposons pour devenir quelqu’un, découvrir en nous quelque chose dont nous ignorions la présence ?

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HOLSTEIN Eric – Petits arrangements avec l’éternité

10/02/2010 12 commentaires

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Petits arrangements avec l eternite HolsteinTitre : Petits arrangements avec l’éternité
Auteur : Eric Holstein
Plaisir de lectureetoile 3 Livre sympa

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Aujourd’hui, ou presque. Paris. Ils vivent heureux. Eugène s’extasie devant les acquisitions d’art de sa nouvelle demeure. Grace s’admire le silicone de seins refaits à neuf ; mais en mieux. Slawomir cuve sans aucun doute un Lafite Rothschild à l’ombre de son pont. Sauf que… Grace n’a pas pu s’empêcher de révéler leur petit secret à Lashandra, son ex golden boy indien. Et lui, veut être de la partie. Question emmerdement, Grace se pose là. Eugène ne supporte plus son ex et Slawomir est près à cracher sa goulée. Les voilà traqués par les Gin Ko Shikari qui rêvent de les éradiquer, ils font face à une secte de javellisés à l’éther et les ancêtres se réveillent. Bienvenue chez les vampires holsteiniens !

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)°º•. Eugène traine sa peau d’appartement en appartement. Il a un goût prononcé pour l’Art peinturesque. Il choisit ses demeures en fonction de leur prestige : bien souvent quand ses propriétaires sont absents. Il découvre parmi les trésors cachés, une superbe machine à écrire rose. C’est le coup de foudre, il la vole. C’est d’ailleurs grâce à ses écrits que nous pouvons lire ce livre… Il vivait une vie heureuse avant que Grace ne réapparaisse encore une fois dans son sillage. Grace, c’est la femme de la campagne, venue à la ville pour démontrer son talent et qui finit par vendre ses charmes. Eugène l’a alors révélée et commence un long calvaire de devoir la supporter, car « l’éternité c’est long, surtout vers la fin ». Siliconée puissance dix, Grace a révélé leur mystère commun à son plein-de-pognon actuel. Lashandra, indien d’origine et épilé des valseuses de son état, veut être dans le coup. Et quoi de mieux d’être prêt à tout pour obtenir l’inimaginable.
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Nos deux compères sont donc obligés de soutirer un peu d’aide de l’Ancien, Slawomir. Ce dernier ne s’intéresse qu’à la boisson de (très grande) qualité. Il cuve généralement sous le pont, la nuit et radote toujours les mêmes inepties quant à la fausse découverte de l’héliocentrisme par son grand concurrent, Copernic.
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Histoire de corser le tout, ils vont être attaqués par les Gin Ko Shikari, littéralement les tueurs d’ombre, une secte hindoue décidée à éradiquer les vampires. Sur ce problème-là, s’ajoute des vampires d’autres lieux, qui se shootent à l’Ether et qui sont rappelés par les Ancêtres, eux-mêmes réveillés par la couillonnade de Grace. Ça promet !
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Oui, vous l’aurez compris, cela promet pas mal d’actions : des bagarres dans tous les coins, des courses poursuites qui n’en finissent plus et des plans et stratagèmes dans tous les sens. Qu’on le sache, les bagarres sont un tantinet répétitives et tiennent en beaucoup de pages. Sincèrement, elles ne servent pas du tout la plausible dynamique du récit. Quand à l’intrigue, elle est relativement passable. Ne vous attendez à une histoire gargantuesque d’imagination, les vampires holsteiniens sont peut-être un peu « nouveau genre », mais c’est bien tout. Le côté loufoque n’est pas très réussi, j’ai eu la chance de connaître et de lire du Christopher Moore et son sot de l’ange. A côté de ce petit bijou humoristique et farfelu, Holstein n’arrive qu’à la deuxième place et loin derrière. Quant à la fin, je la trouve trop grandiose, du too much qui finit en « pan dans ta gueule », dommage.
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Petits arrangements avec l eternite Holstein jacquette

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)°º•. La stéréotypie des personnages n’aide en rien à leur attachement.
D’accord, Eugène éveillé dans le début du vingtième siècle est un argoteur de première, quelque peu amateur d’art mais sans aucun doute profiteur. Grace, née vampire dans les années 30 utilise son côté garce et son côté bombé façon silicone pour harponner les crésus. Slawomir est un clochard alcoolique qui tourne encore autour du principe que la Terre est au centre de l’univers ; et enfin Eddie qui se désigne lui-même par son unique aspect bestial.
Alors oui, leur stéréotype est clairement handicapant.
Ceci dit, ma toute petite préférence va à Maximilien : vampire très imposant de pas son physique et son aura noire et impénétrable ; il est, en sus, plutôt grande gueule et sûr de lui. Un vampire qui impose de toutes ces manières ne peut que forcer mon respect… et obtenir mon admiration.
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Cependant, les vampires holsteiniens sont un peu nouveau genre, car ils…
– ne sont pas sexy : ils rotent, pètent et cuvent leur alcool,
– ne sont pas morts, mais bien vivants et immortels,
– ne dorment pas dans des cercueils à longueur de journée,
– ne craignent pas les crucifix, ni l’ail et pas spécialement la lumière,
– ne se nourrissent pas de notre sang mais de nos émotions et souvenirs,
– sont plus rapides et plus forts que les humains,
– naissent « humain » avec un potentiel pour devenir vampire ou non.

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)°º•. En ce moment (et ce, depuis plusieurs mois), les « vampires » sont un instrument marketing… ayant le vent en poupe. Le grand tort que je reprocherai au livre d’Holstein est finalement d’utiliser « forcément Paris », car « forcément Paris », c’est forcément le « lieu saint » des vampires. La place « in », la place « obligée ». Sauf qu’on aurait pu s’en passer. A ceci est couplé, un certain devoir d’y intégrer des grands noms dans les vampires. Le procédé est déjà connu et on n’en a quelque peu abusé : les vampires peuvent être des gens anonymes, non ?
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Le livre est lui aussi un peu stéréotypé : l’histoire est narrée car ils sont les récits d’Eugène.  C’est un roman raconté à la première personne par le protagoniste. D’accord, certains lecteurs ont adoré mais pour ma part, j’ai trouvé le style trop racoleur et limite ennuyant. Nous y est livré, des confessions un peu mi-figue mi-raisin, raplapla et prévisibles. Le rythme est tout simplement bancal.
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Venons à la partie la plus détestable de mon point de vue. Ce roman est-il un dictionnaire des expressions familières ? J’ai carrément failli décrocher dès les premières pages. En plus du vocabulaire dépassé et vulgaire, Holstein truffe son histoire d’un argot facile et des expressions « qui tuent » de jeunz.
Bref, ce roman, c’est quand même un « trop plein » : plein d’argot, plein d’ironie, plein d’humour pas drôle (même au 26e degré), plein de Christopher Moore mal copié.
Ceci dit, trouvons un point positif : le roman est composé de chapitres relativement courts, chouette, du coup, il se lit relativement vite !
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Bref : c’est un roman avec une version de vampires qui diffère un peu mais pas assez creusée ; sans une intrigue formidable, avec pas mal de bagarres si vous aimez le genre. Il se lit bien pour passer un peu de bon temps mais ne comptez pas sur lui pour entrer dans votre panthéon personnel littéraire.

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Des bagarres, il y en a. De l’intrigue pas folichonne aussi. Mais on peut y ajouter également, de l’argot à ne plus en finir, des vampires nouvelles génération qui ne craignent ni les crucifix, ni l’ail et encore moins la lumière.
Dommage que le concept des mangeurs de souvenirs & d’émotions n’ait pas été un poil développé, dommage que les vampires soient malgré tout coincés dans leur propre portrait, dommage que le livre ressemble à un dictionnaire des expressions familières. Sinon, cela peut passer pour un bon roman de « feuilleton », un poil décalé.

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)°º•. Co-responsable du site ActuSF, Eric Holstein n’est pas inconnu du milieu, au vu de ses quelques nouvelles publiées ici et là. Avec « Petits arrangements pour l’éternité », il signe son premier roman chez Mnémos.

 

Faut comprendre qu’on n’est pas des tueurs. On ne se nourrit pas de votre sang mais de votre temps. De vos instants. En fait, on ne vous fait même pas mal. L’analogie est sans doute un peu approximative, mais je n’en vois pas de meilleure. Et puis soyons réalistes. Vous imaginez sérieusement qu’on pourrait vivre depuis si longtemps parmi vous en laissant derrière nous un tas de cadavres exsangues ? Ou pire, si toutes nos victimes devenaient des bêtes assoiffées de sang ? C’est ridicule.

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Les halos que vous exsudez sont des fanaux qui colorent la nuit des émanations de vos émois. Le sang de la colère, l’incarnat de la gêne ou le carmin de la passion, le noir de la haine, le vert opale de l’ennui, le violine de la peur qui vire à l’indigo sombre lorsque vient la terreur. Celle, par exemple, que nous vous inspirons quand nous vous attaquons. C’est elle que l’on voit s’emparer de vous, teinter votre nimbe avant que nous ne plongions dans votre cou pour humer les instants que nous vous dérobons.

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Critic Blog, Mes Imaginaires (SBM), Journal semi-littéraire (Angua) ont aussi affaire avec ces vampyres.
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Lu dans le cadre du Challenge 1% littéraire et celui du Dark Side Challenge.

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