CHOLLET Mona – Sorcières, la puissance invaincue des femmes
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Titre : Sorcières, la puissance invaincue des femmes
Autrice : Mona Chollet
Plaisir de lecture : Livre à découvrir
Lire les premières pages
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La Sorcière ! Cette figure importante de l’Histoire.
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À travers cet essai, Mona Chollet, journaliste et cheffe d’édition au Monde diplomatique de métier, dresse un portrait de la sorcière moderne. Mais qui est-elle ? La femme indépendante, celle qui prend ses choix par elle-même sans rien devoir à la société et à sa cargaison d’idées bien-pensantes frelatées ou de poussiéreux us et coutumes.
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Mona Chollet revient sur le traitement des femmes dans la société occidentale actuelle ; avec le sexisme ordinaire qui prend racine dans tous les domaines. Le patriarcat veut brider l’autonomie à tout prix, réduire au silence les femmes qui gênent. Et c’est plutôt une affaire qui roule bien puisque dès la naissance, une fille sera sous la coupe d’une éducation liberticide (dans des proportions variant d’une individu à l’autre selon l’environnement). Avec une telle pression quotidienne, on peut comprendre l’intériorisation des femmes et cette obéissance remarquable.
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L’introduction se concentre sur le portrait de la sorcière d’antan et de sa chasse ; profondément misogyne. L’essai s’articule ensuite en trois parties, reprenant trois achétypes : la femme indépendante, la femme qui ne désire pas d’enfant et la femme âgée. Vous pouvez consulter la table des matières dans son entièreté, à l’avant dernière page de l’extrait.
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Si l’on est tatillon.ne, on pourrait trouver un certain déséquilibre dans les parties, mais il repose davantage sur la structure du texte et non l’argumentation. L’autrice ne brosse pas le portrait d’une femme aux idées que l’on pourrait qualifier d’extrémistes mais celui simple, d’une femme qui assume ses choix.
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J’ai été singulièrement interpellée par différents points : par ces femmes qui demandent une stérilisation volontaire ; par la répartition des femmes sans enfant par rapport à leur attitude vis-à-vis des enfants : attitude de la mère, celle de la tante ou celle qui n’aime tout simplement pas les enfants (et sans velléité à leur égard) ; par l’existence de ces femmes qui aiment leurs enfants sans aimer être mère (état qui ne m’a pas surprise, puisque des personnes de mon entourage ont parlé de leur conclusion) ; par le jugement vis-à-vis des femmes vieilles qu’il faut cacher.
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De quelques avis disponibles sur les Internets ressortait l’opinion que les écrits manquaient de nuance concernant la maternité. Je n’ai aucunement senti que Mona Chollet labellisait que pour être « sorcière » il ne fallait pas avoir d’enfant. D’abord, car l’on reste sur le concept de « sorcière = femme indépendante », pas sur le fait d’en être une-testée-approuvée-diplômée. Puis, elle écrit et développe son argumentation sur deux points fondamentaux : une non-maternité et un non-désir d’enfant qui doivent faire partie des possibilités pour les femmes. Tout compte fait, je note une distinction entre ce qu’il est écrit dans cet ouvrage et l’interprétation du/de la lecteur.rice. Ressenti qu’il est important de prendre en compte mais qui variera d’une personne à l’autre (maternité ou non-maternité vécue) ; je ne me suis nullement sentie jugée dans mes propres choix en lisant « Sorcières, la puissance invaincue des femmes ».
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Dès les premiers mots, Mona Chollet désamorce toute volonté scientifique : elle exprime son point de vue personnel – et donc subjectif. Elle dresse un constat bordé de son opinion et sans imposer de vérité absolue.
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L’esprit de synthèse et d’analyse de l’autrice permet d’offrir un essai d’une grande accessibilité grâce à la vulgarisation des informations. Il se révèle riche et bien documenté. D’ailleurs, elle cite toutes les sources avec autant d’humilité que celle qui berce sa démarche intellectuelle. L’abondante bibliographie est un des aspects le plus passionnant du livre, nous invitant à étendre notre curiosité au-delà de ces couvertures.
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L’écriture est fluide, simple et non pas simpliste. Il est agréable à lire tant sur la forme que sur le fond. L’humour nait de l’autodérision que l’on retrouve dans les anecdotes personnelles rapportées. Ajoutées à des représentations issues de la résonance, le rapport de connivence entre lectrice et autrice est intense.
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Mona Chollet met en lumière des femmes qui font des choix « difficiles » par rapport à ce qui est attendu d’elles. Elle invite à inverser la perspective : et si les femmes transmuaient ? Au lieu de cataloguer certaines personnes ayant un caractère subversif ou une attitude rebelle, il serait « bien » de les considérer comme intégrant la normalité féminine. S’affranchir des injonctions faites aux femmes doit être une volonté de tous les jours et peut-être que la reconnaissance et la solidarité nouvelles seraient aussi une base bienvenue (le concept de sororité).
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La lecture est instructive et même nécessaire.
Elle peut renvoyer le/la lecteur.rice à beaucoup de questions personnelles et peut provoquer une remise en question de sa vision.
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Si vous êtes intéressé.e par la très vaste thématique du féminisme, vous trouverez certaines redondances – qui n’en sont pas moins qualitatives – avec d’autres écrits. J’ai une préférence pour l’essai « Ainsi soit-elle » de Benoite Groult qui retrace davantage l’Histoire des femmes, notamment sur leurs droits et leurs conditions (tout aussi accessible et argumenté).
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C’est un ouvrage passionnant, à offrir à toute personne pour qui la thématique peut résonner (de près et même de très loin). Il peut entraîner une prise de conscience de cet aspect sociologique à travers des femmes réelles ou fictives.
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Pour moi, il est particulièrement complexe de parler d’un tel essai avec mes propres mots. Je suis donc consciente de ne pas même pas avoir parlé de l’ensemble des aspects dont traite ce livre ; donc d’avoir été réductrice et d’avoir surtout souligné certains faits sans même réussir à indiquer tous les points qui m’ont questionnée. C’est la vie 😜. Conclusion : lisez-le !
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Dans le chaudron : des essais englobant une part du féminisme
Quelques mots sur « Ainsi soit-elle » de Benoît Groult, sur « La chair interdite » de Diane Ducret et sur « Libres » d’Ovidie & Diglee ; ma chronique sur « Enfin insécurisée » d’Eve Ensler et celle sur les deux romans graphiques de Liv Strömquist.
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Cette lecture est sorti de la marmite de Valériane pour célébrer le printemps et pour fêter le début de notre septième année de challenge « Défi Valériacr0 ».
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Des galipettes entre les lignes (Lili Galipettes), Le Livroblog (Hilde), Les petites addictions de Cranberries, Margaud Liseuse ont elles aussi relevé de nombreux passages.
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J’ai aussi beaucoup aimé cet essai. Je n’ai pas trouvé que Mona Chollet jugeait les choix des femmes par rapport à la maternité, mais qu’en effet elle insistait pour que ce soit un choix. Et je suis tout à fait d’accord : la bibliographie fait partie des grands atouts de ce livre !
Par contre, j’ai un bémol sur la dernière partie du livre (sur la guerre à la nature). Je trouve qu’elle tend à essentialiser les femmes, même si elle s’en défend. J’ai vraiment été gênée par la fin de l’ouvrage. Pour le reste, super intéressant !
Je note la référence Ainsi soit-elle, merci du tuyau !
Je suis d’accord que partir en guerre est une idée bien trop violente – et même généraliste – pour que je sois d’accord. Œuvrer pour changer la situation et dire qu’elle ne me convient pas m’apparaissent comme des actions plus stratégiques. C’est aussi dans cette partie que Mona Chollet développe le regard que la médecine pose sur les femmes, point précis que je partage (j’ai bien trop d’exemples en tête, personnels ou de mon entourage pour mettre des œillères). Mais dans l’ensemble on se rejoint, un essai intéressant à découvrir 🙂
J’ai lu des critiques très sévères sur ce livre mais n’en ait pas retenu l’essence, je sais juste que le jour où je pencherai sur l’éventuel achat de ce livre il faut que je les remette en perspective avec des critiques positives, pour faire mon choix.
Je pense qu’il est question de sensibilité et d’ouverture aussi. Je n’attendais rien de cet essai et j’étais curieuse de voir ce que Mona Chollet avait à dire donc je l’ai bien reçu. Je n’avais pas d’attente car je savais a priori qu’elle développait des réflexions personnelles (elle n’a jamais véhiculé l’idée de vouloir être une fervente défenseuse du féminisme avec majuscule). Ceci dit, je suis intriguée de savoir ce que reprochent les autres lecteurs à cet ouvrage, je vais aller à la pêche aux avis.
J’achète pratiquement tous les Mona Chollet au boulot, faudra quand même que j’en lise un jour (celui-là peut-être d’ailleurs, vu comment il buzz)
J’aimerais bien découvrir maintenant « Beauté fatale » de l’autrice 🙂
J’ai beaucoup aimé ce titre et je me pencherai sur le travail de Mona Chollet à l’avenir surtout pour Beauté fatale.
Il n’y a rien de jugeant dans cette lecture, si les gens se sentent agresser c’est peut-être tout simplement qu’il y a un écho avec leur vécu sur lequel ils n’ont aucune envie de se pencher et réagissent vivement par sentiment de malaise.
Ah ! J’aimerais justement découvrir Beauté fatale 🙂 Je rejoins ton avis sur le pourquoi (ou la possibilité) de l’agression ressentie par certains lecteurs.
Pour une qui ne savait pas comment en parler, tu as quand même rédigé une belle tartine 😉
Tu encourages la lecture, c’est sympa.
Et donc, mention spéciale à ta photo d’illustration 😉
Oui mais uniquement sur les points sur lesquels je souhaitais écrire 😉 Merci !
En tout cas belle tentative de chronique! Moi tu m’as donné envie de le lire 🙂
Merci 😊
J’ai lu Beauté fatale qui m’a apporté de nouvelles pistes de réflexion.
Tu me donnes envie de lire celui-ci 🙂
À l’inverse, j’aimerais bien découvrir Beauté fatale maintenant 🙂
Je ne pense pas commencer par cet ouvrage, j’ai noté La chair interdite et Ainsi soit-elle qui me tentent finalement plus 😉 Mais celui-ci a l’air quand même intéressant et j’approuve cette idée de « choix ». L’important n’est pas le choix effectué mais la fait de pouvoir choisir… Et je pense qu’il y a encore du progrès à faire en la matière pour les femmes ! En tout cas, belle chronique !
Merci ! Ainsi soit-elle est un bon point de départ. J’ai commencé par celui-ci et encore aujourd’hui, il reste ma « base » et les autres viennent enrichir sur certains points. Ah oui, le féminisme a encore de beaux jours devant lui…
Il est dans ma PAL celui-ci, il faut juste que je l’en sorte !
Il est déjà prêt à être dégainé, c’est plutôt bon signe !
J’ai hâte de le lire ! Beauté fatale avait été – il y a fort longtemps 😉 – ma première incursion dans un essai féministe et j’en garde un très bon souvenir. Mona Chollet a vraiment l’art de faire passer des informations simplement, mais solidement. C’est accessible dans la forme, et dense – mine de rien- dans le fond.
Ah je suis contente de lire ton retour à propos de la plume de Mona Chollet, j’aimerais bien découvrir Beauté fatale justement.